100 jours pour changer la vie des Français, ou le pari fou et dangereux d’Emmanuel Macron

Le Président de la République joue-t-il avec le feu ? L’intersyndicale lui demande de retirer la réforme des retraites qu’il a promulguée vendredi soir juste après sa validation par le Conseil Constitutionnel. Emmanuel Macron qui s’est exprimé, ce lundi 17 avril à 20 heures (heure de Paris), pour la deuxième fois depuis son élection, il y a un an, a fait « z’oreille cochon dan’ marmite pois ». Il n’a rien voulu entendre : ni retrait. Il fallait s’y attendre ! Ni référendum. Mais pour cela, une partie des Français espère encore que le Conseil Constitutionnel leur donnera raison, le 3 mai prochain, sur le RIP (Référendum d’initiative populaire).

A part ça, quoi retenir de cette intervention télévisée du Président de la République ? Pour résumer, je retiendrai qu’Emmanuel Macron a demandé aux Français de lui laisser 100 jours pour changer leur vie. 100 jours pour plus de travail, plus de justice et plus de progrès. Voilà, sa nouvelle feuille de route !

100 jours pour convaincre, pour apaiser une colère qui ne cesse de monter partout en France, 100 jours pour baisser les prix, 100 jours pour augmenter les salaires des ouvriers ou encore celui des enseignants, 100 jours pour remplacer les enseignants absents, 100 jours pour désengorger les services des urgences dans les hôpitaux, 100 jours pour régler le problème des déserts médicaux, 100 jours pour « trouver des solutions concrètes afin d’améliorer la vie quotidienne » en Outre-mer, 100 jours d’action, d’unité, d’ambition… Bref, 100 jours pour faire des miracles !

Disons-le tout de suite, le discours d’Emmanuel Macron pour apaiser la colère des Français et sortir de la crise, n’a pas convaincu puisqu’il a été accueilli dans quelques grandes villes du pays, à Paris et à Marseille notamment, par un concert de casseroles, puis par des feux de poubelles dans la capitale où la police (la Brave-M) a été contrainte de charger.

Rien de nouveau sous le soleil !

Emmanuel Macron, plutôt enjoué, pour ne pas dire un brin arrogant, s’est voulu offensif en déroulant une feuille de route déjà entendue depuis son élection à l’Elysée. Rien de nouveau sous le soleil ! Il a récité des chantiers déjà annoncés comme le travail (ramener vers le travail les bénéficiaires du RSA, améliorer les revenus, accroître l’emploi des séniors) ; La justice (plus de magistrats et d’agents, 200 brigades de gendarmerie dans les campagnes) et le Progrès (bâtir une vie meilleure en améliorant les services publics avec moins de bureaucratie, moins de technocratie…). Plus de santé aussi (mettre fin au numerus clausus, plus de moyens pour les hôpitaux, plus de médecins). Plus d’éducation également (réforme des lycées, augmentation de salaire pour les enseignants, plus de sport, de mathématique, de français à l’école…). Emmanuel Macron se donne 100 jours « pour reconstruire et retrouver l’élan de la Nation ». Voilà pour le discours.

Quelle sera la méthode ? C’est bien là que le bât blesse car le chef de l’Etat a dit (ou redit), ce qu’il veut faire pour le pays, il s’est fixé (ou re fixé) un cap, mais il n’a jamais dit comment il va s’y prendre pour y parvenir, comment il va faire pour redonner du pouvoir d’achat aux ménages, comment il va réussir à augmenter les salaires de celles et ceux qui travaillent. La simple comparaison avec la reconstruction de Notre Dame de Paris ne suffit pas.

Les Français s’attendaient à du concret, ils ont eu droit, hier soir, à des redits, au fameux Conseil national de le Refondation, par exemple. Ils ont eu droit, en somme, à un discours « hors sol », hors de la réalité urgente eu égard au contexte social qui prévaut depuis ces dernières semaines dans le pays.

Il y a plusieurs façons d’interpréter ce discours présidentiel : soit Emmanuel Macron a une botte secrète qu’il compte utiliser pour réussir le miracle promis en 100 jours, soit il joue sur le facteur temps en mettant son gouvernement devant le fait accompli. Et si, d’ici au 14 juillet (date butoir qu’il a donnée) rien ne change, il procèdera à un changement de l’équipe gouvernementale et donc de Première ministre. En sachant que lui ne craint rien pour son CDD de 5 ans.

D’ailleurs, s’il a reconnu « la colère des Français », c’est, a-t-il dit, « face aux prix », « face à l’inflation », « face au travail qui ne paye pas assez », mais à aucun moment, Emmanuel Macron ne s’est remis en cause personnellement feignant de ne pas comprendre que les Français l’ont surtout pris comme bouc-émissaire d’une réforme des retraites « imposée » qu’ils n’en veulent pas et d’une situation économique et sociale qu’ils ne peuvent plus supporter. Les 100 jours à venir seront sans doute les plus durs pour la Macronie.

Yves Mont-Rouge

 

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